Deux économistes américains, Card et Krueger, ont évalué en 1995 l’effet du salaire minimum sur l’emploi aux Etats-Unis à travers l’exemple des restaurants McDonalds.
En 1992, l’Etat du New Jersey a porté de 4,25 à 5,05 $ son salaire minimum horaire. Cela a permis aux deux économistes de réaliser une expérience naturelle en comparant 410 restaurants entre le New Jersay et les communes voisines de Pennsylvanie, où le salaire minimum est resté constant.
Que montre leur expérience ? Qu’une hausse du salaire minimum peut augmenter le niveau d’emploi au lieu de le diminuer. Pourquoi ? Si le salaire minimum est faible et proche des minima sociaux, c’est-à-dire inférieur au salaire de réserve (le salaire en-dessous duquel un demandeur d’emploi n’a pas intérêt à accepter une offre d’embauche), toute hausse du salaire minimum attire sur le marché du travail de nouveaux travailleurs que les entreprises ont intérêt à embaucher.
C’est aussi ce qui s’est récemment passé au Royaume-Uni, où la revalorisation continue du salaire minimum entre 2010 et 2015 (+13 %) s’est également accompagné d’une amélioration du taux d’emploi (+3,5 points durant la même période, pour s’établir à 73,5 %).
En revanche, si le salaire minimum est déjà élevé, toute hausse incite les entreprises à se séparer de leurs employés dont la productivité vient d’être dépassée par la nouvelle valeur du salaire minimum. Selon Kramarz (2000), le salaire minimum peut ainsi accroître le chômage des jeunes : les personnes rattrapées par le salaire minimum dans les années 1980 ont ainsi connu une plus grande probabilité de perdre leur emploi que celles dont le salaire est resté très proche mais n’a pas été dépassé par le salaire minimum.
Il faut enfin rappeler que le salaire minimum constitue également un levier pour les décideurs économiques permettant d’orienter le partage de la valeur ajoutée. Ainsi, aux Etats-Unis, la valeur réelle (après inflation) du salaire minimum était plus faible en 2012 qu’en 1970, tandis qu’elle n’avait cessé d’augmenter en France. C’est l’un des facteurs explicatifs du fort taux de chômage chez les travailleurs peu qualifiés en France et du haut niveau d’inégalités de revenus aux Etats-Unis.