Le PIB ne nous dit pas tout

Le produit intérieur brut (PIB) mesure les richesses produites durant l’année par les unités résidentes. Par sa fiabilité, il contribue à la conception et à l’évaluation des politiques publiques : il permet des comparaisons dans le temps et l’espace et il est utilisé pour déterminer d’autres indicateurs tels que le solde budgétaire structurel. Jusqu’à la fin des Trente Glorieuses, l’usage du PIB a ainsi fait consensus dans un contexte où accroissement des richesses et amélioration du bien-être se confondaient.

 

Toutefois, s’il constitue un indicateur fiable pour mesurer la croissance économique, le PIB demeure limité dans sa portée. En particulier, il ne permet pas de rendre compte du niveau de bien-être et de progrès social dans une économie. « On ne tombe pas amoureux d’un taux de croissance », disait le slogan de mai 1968. Ainsi, par construction, le PIB n’intègre pas certaines activités socio-économiques telles que le travail domestique ou le bénévolat, dans la mesure où elles ne donnent pas lieu à valorisation sur un marché monétaire. Par ailleurs, sa mesure est indifférente au niveau des inégalités de revenus ou de patrimoine – ainsi, un accroissement du PIB par habitant peut masquer une répartition inégalitaire des richesses –, mais aussi aux externalités négatives que peut engendrer une hausse de la production, notamment au plan environnemental.

 

C’est pourquoi depuis les années 1990, les institutions internationales recherchent une mesure alternative du développement qui intégrerait par exemple la soutenabilité environnementale ou les modalités de répartition des richesses. Le programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a ainsi introduit en 1990 l’indice de développement humain (IDH) sur la base des travaux d’Amartya Sen. Celui-ci tient compte du PIB par habitant en parité de pouvoir d’achat, de l’espérance de vie à la naissance ou encore du taux d’alphabétisation des adultes et du taux de scolarisation des enfants. En tête du classement de l’IDH figure la Norvège, les Etats-Unis se classent en 10e position et la France 21e. D’autres indicateurs ont été développés par la suite, tels que le « Better Life Index » de l’OCDE (2012) ou le revenu national disponible net de la commission Stiglitz (2008).

 

Ces nouveaux indicateurs soulèvent toutefois des interrogations : comment valoriser les composantes non monétaires du développement ? (par équivalent-revenu ou par un indicateur synthétique) quel périmètre retenir ? (intégration potentielle de la qualité des relations sociales ou du niveau de sécurité par exemple) En outre, ils ne modifient pas sensiblement la vision des niveaux de vie que fournit le PIB par habitant : ce sont globalement les mêmes pays qui combinent un revenu par habitant faible, des inégalités importantes, un fort taux de mortalité et un faible temps consacré aux loisirs.

 

Si le PIB demeure limité dans sa portée, aucun des nouveaux indicateurs du bien-être n’a conduit à le remplacer. Ils représentent plutôt une information complémentaire au PIB du point de vue des décideurs publics.

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